Gaël Faye

Dinosaures
J'ai des touracos dans l’thorax quand j'embrasse des libellules Mets des lettres d'amour pleines d’anthrax, c'est du poison dans mes cellules Je tutoie les ouragans depuis qu'j'ai oublié mon nom J'suis à la mode, j'suis dans le vent, j'suis l'éolienne des pharaons J’ai des colères insoumises dans mon goître de pélican Depuis qu’la mort fait des remises, j'achète mes cancers à trente ans J’suis l'épilogue de mon époque, assis à la table des matières J'ai fait de mes dieux des microbes sous l'hélice des coléoptères J’suis le rugissement de la foule, la solitude des grands félins Et dans la rumeur de la houle j'entends la mer des orphelins J'suis l'eczéma dans les nuages, j'ai des smartphones dans mon coltan À vouloir chevaucher l'orage j'ai dix mille volts dans mon sang Je suis le fils des antipodes, au fond des yeux j'ai des tympans La canne à sucre avait ses Code noir, caoutchouc de roues de paons Mémoire de larmes à la dérive, j'suis le déclin du nénuphar J'ai du lyrisme dans l'iris et le port de tête d'un Afar Où sont les dinosaures ? Où sont les dinosaures ? Où sont les dinosaures ? J'ai braconné la bête immonde dans l'terrier des peurs calfeutrées Les cancrelats sont vagabonds et leurs contours sont à la craie J'ai les névroses de l'écureuil qui vit à l'orée des chaos Dans le ventre de ces villes mille-feuilles aussi belles que des calaos Je suis l'errance de la cigogne frappée du diadème de l'exil Letras de cancionesEt j'ai la tolérance frivole sous mes plumes samba du Brésil Sans terre on finit sous le sable, dans la forêt trop capitale Paysan sous l'arbre à palabres, je cultive mon champ lexical Extraction des matières dernières, le carnassier ne voit plus ses proies J'ai dit : « Bye-bye, à la prochaine » comme le chat du resto chinois Dans mon regard marécageux, y a l'évidence du long sommeil L'origami n'est plus un jeu quand l'incendie est un soleil J'enfile des yeux canadair pour aller chanter nos abîmes Autant pêcher dans le désert quand on s'enfonce dans nos ravines Je suis la tragédie d'une pomme, celle qui m'attire comme un aimant Je meurs de la folie des hommes et de la furie des éléments Où sont les dinosaures ? Où sont les dinosaures ? Où sont les dinosaures ? C'est l'chaos sur un teint Pepsi, moins le quart avant l'apocalypse En me disant « Peut-être qu'un messie viendra Donc à quoi bon vouloir prendre des risques ? » Je remets mes deux écouteurs, posé parce que dehors ça gronde et J'reste à côté du radiateur dans l'carré V.I.P. du monde L'ours bounce, bounce, bounce sur la banquise, offre des mabroukas Le tigre danse, danse, danse, dans la forêt danse le makossa La râleuse pique pense, pense, sur un air de bossa nova Qu'il n'reste que lui et lance : « C'est la fin des feijoadas ! » Les animaux sont des punks No future pour le panda La jungle danse la funk L'insurrection ne vient pas Le colibri éteint le brasier Avec des gouttes de Coca Le gorille ne veut plus la télé Mais élire Francis Fukuyama, ah-ah-ah-ah-ah Dehors y a grabuge Mais personne ne bouge Oui monsieur le juge, après moi le déluge Dehors y a grabuge Mais personne ne bouge Oui monsieur le juge, après nous le déluge Où sont les dinosaures ? Où sont les dinosaures ? Où sont les dinosaures ? From Letras Mania